N’ayant pas d’enfants,il veut léguer une partie de ses biens à sa femme et à sa nièce et faire du reste une donnation

Question Je suis âgé de 72 ans et j’ai 5 frères et 2 sœurs. Je me suis marié mais je n’ai pas d’enfants, ce qui m’a poussé à adopter ma nièce. Nous, les six frères, sommes associés à la gestion d’une société depuis 1962. Nous travaillons ensemble. Ma part du capital représente 20%. Etant donné…

Question

Je suis âgé de 72 ans et j’ai 5 frères et 2 sœurs. Je me suis marié mais je n’ai pas d’enfants, ce qui m’a poussé à adopter ma nièce. Nous, les six frères, sommes associés à la gestion d’une société depuis 1962. Nous travaillons ensemble. Ma part du capital représente 20%. Etant donné que ma fille adoptive m’aide dans le travail, j’ai l’intention de lui léguer 60% de ma fortune et 25% à ma femme pour faire donnation du 15% à des projets caritaitfs après mon décès. M’estil permis de leur demander de renoncer à leurs parts avant ou après mon décès? M’est il permis de céder 60% de ma fortune à ma fille adoptive pendant ma vie? M’estil permis d’ecrire un testament à ce propos pour qu’il soit exécuté après ma mort? Est-ce que j’ai agi selon ce que la loi religieuse juge juste. Si ce que j’ai fait n’est pas juste du point de vue de la loi religieuse, quelle est la meilleure solution qui me permette de faire hériter ma fille adoptive? Quelle est la méthode islamique en matière de répartition de la succession?

Louange à Allah.

Si par adoption vous voulez dire que la fille est
devenue comme votre propre fille de sorte que vous soit
affiliée et qu’elle porte votre nom,
c’est interdit et n’est pas permis. Allah l’a annulé dans le Coran en disant: Il
n’a point fait de vos enfants adoptifs vos propres enfants. …. Appelez-les du nom
de leurs pères: c’est plus équitable devant Allah. Mais si vous ne connaissez
pas leurs pères, alors considérez-les comme vos frères en religion ou vos
alliés. Nul blâme sur vous pour ce que vous faites par erreur, mais (vous serez
blâmés pour) ce que vos cœurs font délibérément. Allah, cependant, est Pardonneur et Miséricordieux. (Coran,33:4-5).

Si, en revanche, vous entendez par adoption, que
vous la prenez en chargeen l’installant
chez vous et en vous occupant convenablement de son éducation, c’est une chose
recommandée. Pour vous, cela relève du chapitre de l’entretien du lien de
parenté car la fille de votre frèrefait
partie de vos proches collatérales qui vous sont interdites en mariage. Or , il est bien connu que la bienfaisance qui profite aux
collatéraux est préférable à celle qui profite à des étrangers. An-Nassai (2582) et at-Tirmidhi
(658) et Ibn Madjah (1844) d’après Salman ibn Amer (P.A.a) que le Prophète (Bénédiction et salut soient sur
lui) a dit: Certes, l’aumône faite au profit d’un pauvre vaut une seule aumône
et celle faite en faveur d’un proche en vaut deux: une aumône et geste
d’entretien du lien de parenté. (Jugé authentique par al-Albani
dans Sahih an-Nassaai.

S’agissant des dons que vous voulez faire àvotre nièce et à votre épouse, si vous
voulez l’exécuter pendant votre vie, il n’ya aucun inconvénient à le faire, à ces conditions:

La première condition est de le faire alors que
vous êtes bien portant non en état de maladie grave car le don fait pendant cet
état est assimilable à un testament. Par conséquent, il ne peut pas profiter à
un héritier ni à un non héritier si son montant dépasse le tiers de la
succession, à moins que les héritiers ne l’entérinent.

Cheikh Abdourrahman
ibn Djabrinea
dit: «Il est permis à l’époux bien portant d’offrirà son épouse ce qui lui plaît pour
récompenser sa patience, ses bons services ou son apport en nature ou en
espèce, à condition de ne pas agir ainsi pour porter préjudice à d’autres
héritiers (potentiels). Le don à faire ne serait pas limité au quart des biens
ou à un autre pourcentage. Il en est de même pour l’épouse car elle peut offrir
à son époux ce qui lui plait des es propres biens ou du reliquat de sa dot,
compte tenu de la parole du Très haut: Si de bon gré, elles vous en abandonnent
quelque chose, disposez-en alors à votre aise et de bon cœur. (Coran,4:4). Mais
cela n’est permis à une épouse gravement malade puisque le geste serait assimilé
à un testament fait en faveur d’un héritier.» Extrait de fatawas
islamiques (3/29).

Les ulémas ont défini les critères de la maladie
grave. A ce propos, Cheikh ibn Outhaymine (Puisse
Allah lui accorder Sa miséricorde) a dit: La maladie grave est celle qui peut
sans surprise pour personne aboutir à la mort du malade. En d’autres termes, personne
ne serait surprise si on en meurt. On dit encore c’est
la maladie qui fait croire fortement que le malade va mourir. Le contraire est
la maladie qui entraîne rarement la mort. Extrait de Charh
al-moumt’i ala zad al-moustaqnaa (11/101).

La deuxième condition est de ne viser pas à
travers la donation de porter préjudice aux héritiers et de les priver de la
succession. Nous avons déjà expliqué que la donation motivée par l’intention de
porter préjudice aux héritiers est interdite. Se référer à ce propos à la fatwa
n° 182290.

En réalité, il apparait
clairement à travers votre question que vous êtes soucieux d’empêcher vos
frères et vos sœurs de bénéficier de votre succession. Voilà pourquoi vous
veillez à ce qu’ils vous signent une garantie de ne pas réclamer une part de
votre héritage après votre décès. Ce qui est indubitablement interdit. Il vous
est en effet interdit tout acte visant à porter préjudice à une partie des
héritiers ou à les exclure de la succession.

Troisième condition est de remettre la donation
à votre nièce ou à votre épouse pendant votre vie de manière à ce qu’elles
puissenten jouir pleinement comme des
propriétaires légales.

Si vous avez enregistré des biens au nom des
intéressés, à condition de n’en prendre possession qu’après votre décès, c’est
alors un testament. Or, on ne peut pas faire un testament au profit d’une
épouse car elle est une héritière et, en tant que telle, elle ne peut pas
bénéficier d’un testament en vertu de ce qu’Abou Dawoud
(28790) a rapporté ainsi qu’at-Tirmidhi (2120) et Ibn
Madjah (2713) et an-Nassai
(4641) d’après Abou Oumamah (P.A.a)
qui a entendu le Messager d’Allah dire: Certes, Allah a donné à tout ayant droit son dû. Dès lors,
aucun testament ne peut être fait au profit d’un héritier. Ce hadith est jugé
authentique par Cheikh al-Albani dans Sahih Abou Dawoud.

Mais si jamais quelqu’un fait un testament au
bénéfice de l’un de ses héritiers et que les autreshéritiers y consentent, on l’exécute
, vu la parole du Messager d’Allah (Bénédiction et salut soient sur
lui): Il n’est pas permis de faire un testament au profit d’un héritier à
moins que les autres héritiers ne l’acceptent. (Rapporté par ad-Daraqoutni et jugé bon par al-Hafedz
Ibn Hadjar dans Boulogh
al-Maraam.

Ibn Qoudamah (Puisse
Allah lui accorder Sa miséricorde) dit dans al-Moughni
(6/58) : «Si on fait un testament pour un héritier et que les autres héritiers
s’y opposent, le testament reste invalide à l’avis de tous les ulémas. Ibn al-Moundhir et Ibn Abdel Barr ont dit: les ulémas sont
unanimes à le soutenir. Des informations reçues du Messager d’Allah
(Bénédiction et salut soient sur lui) vont dans ce sens. A ce propos, Abou Oumamah aaffirmé
avoir entendu le Messager d’Allah (Bénédiction et salut soient sur lui) dire: Certes,
Allah a donné à tout ayant droit son dû.
Dès lors, aucun testament ne peut être fait au profit d’un héritier. (Rapporté
par Abou Dawoud, par Ibn Madjah
et par at-Tirmidhi). Si le testament est accepté par
les autres héritiers, il sera exécuté selon l’avis de la majorité des ulémas.»

S’agissant du testament fait au profit de votre
nièce, il est acceptable, pourvu qu’elle ne soit pas une héritière. Un tel
testament constitue une voie légale permettant de lui transmettre des fonds
après votre décès. Cependant le testament fait pour elle ou pour un autre ne
doit pas dépasser le tiers de la succession. En effet, le Messager d’Allah
(Bénédiction et salut soient sur lui) a interdit à Saad ibn Abi
Waqqas (P.A.a) de fait un
testament portant sur un montant dépassant le tiers. A ce propos, al-Bokhari (2742) et Mouslim
(1628) que Saad ibn Abi Waqqas
a dit:

-Messager d’Allah! Je vais faire de tous mes
biens un testament!

-Non, dit le Prophète.

– Donc la moitié, dis-je

– Non, dit encore le Prophète.

– Donc le tiers; dis-je.

D’accord pour le tiers encore que le tiers soit
beaucoup. Certes, il vaut mieux que tu laisses tes héritiers riches au lieu de
les laisser pauvres et dépendants des autres.» Conclut le Prophète.

On lit dans les fatwas de la Commission
Permanente (16/317): «Le testament ne peut porter sur un montant supérieur au
tiers et ne peut pas non plus profiter à un héritier, à moins que les autres
héritiers le valident en ce qui concernent leurs parts respectives en vertu de
la parole du Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui): Certes, Allah a
donné à tout ayant droit son dû. Dès lors, aucun testament ne peut être fait au
profit d’un héritier. (Rapporté par Ahmad, par Abou Dawoud,
par Ibn Madjah et par at-Tirmidhi
et par ad-Daraqoutni, ce dernier ajoute: à moins que
les autres héritiers ne le veuillent).

Bon nombre d’ulémas recommandent que le montant
du testament soit inférieur au tiers. On lit dans al-Kafi
traitant du droit hanbalite (2/265): «Ibn Abbas dit: j’aimerais que les gens fassent
des testaments inférieurs au tiers, compte tenu de la parole du Messager
(Bénédiction et salut soient sur lui):D’accord pour le tiers encore que le
tiers soit beaucoup. (Cité par al-Bokhari et par Mouslim). Abou Baker fit un testament portant sur le
cinquième de ses biens et dit: je me contente de ce qu’Allah a jugé
satisfaisant.» Ali, lui, dit: faire un testament portant sur le cinquième m’est
préférable à en faire un qui porte sur le tiers.»

Il faut attirer l’attention sur le faitqu’il n’est pas permis de faire un testamentavec l’intention de porter préjudice aux héritiers , comme nous l’avons expliqué dans la fatwas n°
74974.Quant à la demande que vous avez adressée à vos frères pour les amener à
renoncer à leurs parts de votre succession, nous ne vous le conseillons pas
pour plusieurs choses:

1.Un
tel geste traduit la volonté de priver les concernés de leur droitprescrit par la religion. Or, il est bien
connu qu’une telle volonté est interdite. On a déjà expliqué que le testament
et la donation faites dans le but de porter préjudice aux héritiers ou pour les
priver de jouir de leur droit à la succession est interdite.

2. Ce geste est de nature à semer la méfiance et
la haine entre vous et vos frères, sentiment que Satan pourrait exploiterpour provoquer la détérioration de vos
relations eninspirant à vos frères que
vous les haïssez etne voulez pas qu’ils
profitent de vos biens après votre mort.

3.Ils
pourraient renoncer à leurs parts de la succession malgré eux mais mus par la
pudeur et la gêne. Or, il est bien connu qu’il n’est pas permis d’exploiter de
tels sentiments pour spolier les droits d’autrui. On lit dans al-fatawas al-fiqhiyyah
al-koubra (3/30): «Ne voyez vous pas le consensus
qui a été rapporté selon lequelsi la
timidité d’une personne le pousse à accepter qu’on lui extorque un bienmalgré elle, le bien usurpé ne devient pas la
propriété du détenteur? La raison en est que l’usage de l’épée que constitue la
timidité est assimilable à l’épée matérielle. Bien plus, beaucoup de gens
résistent à cette épée et acceptent la douleur des blessures qu’elle provoque
mais ils refusent de se laisser influencer parla timidité afin d’éviter la perte de leur honneur et leur prestige,
valeurs combien précieuses aux yeux des gens raisonnables qu’ils craignent à
juste titre de perdre.

S’agissant du jugement de la loi religieuse
portant sur la répartition de la succession, le voici:

Premièrement, on prélève d’abord de la
succession ls frais dela préparation de l’enterrement du mortcomme sa toilette et son habillement et
l’aménagement de sa tombe. On lit dans le Sahih
d’al-Bokhari (2/77). Ibrahim dit: On commence par
l’acquisition du linceul puis le paiement des dettes puis l’exécution du
testament. Soufyan dit: les frais de l’aménagement de
la tombe. Les frais de la toilette mortuaire et de l’acquisition du linceul
relèvent du même chapitre de dépenses.

Deuxièmement, après la préparation du mort à
l’enterrement, on paye ses dettes, s’il en avait. Ensuite on exécute son
testament dans la limite du tiers des biens ou moins, compte tenu de la parole
du Très haut: ..après exécution du testament qu’il
aurait fait ou paiement d’une dette.. (Coran,4:11).

Troisièmement, la répartition de la succession
aux héritiers doit se faire conformément aux dispositions de la loi religieuse.
Quant à votre propre succession, elle reviendra exclusivement à votre épouse et
à vos frères, si vous mouriez avant eux. Votre épouse recevra le quart à cause
de l’absence d’enfants éligibles à la succession en vertu de la parole du Très
haut: Et à vous la moitié de ce que laissent vos épouses, si elles n’ont pas
d’enfants. Si elles ont un enfant, alors à vous le quart de ce
qu’elles laissent, après exécution du testament qu’elles auraient fait ou
paiement d’une dette. Et à elles un quart de ce que vous laissez, si vous
n’avez pas d’enfant. Mais si vous avez un enfant, à elles alors le huitième de
ce que vous laissez après exécution du testament que vous auriez fait ou
paiement d’une dette. Et si un homme, ou une femme meurt sans héritier direct, cependant
qu’il laisse un frère ou une sœur, à chacun de ceux-ci alors, un sixième. S’ils
sont plus de deux, tous alors participeront au tiers, après exécution du
testament ou paiement d’une dette, sans préjudice à quiconque. (Telle est l’)
Injonction d’Allah! Et Allah est Omniscient et Indulgent. (Coran,4:12). Le reliquat reviendra à vos frères
, le mâle recevant le double de la part de la femelle. C’est-à-dire que
la part du frère sera le double de celle de la sœur.

En somme, le conseil que nous vous donnons est
de léguer à votre nièce une partie de votre fortune qui ne dépasse pas le
tiers. Elle pourrait la recevoir après votre mort. Vous pouvez aussi la lui
remettre pendant votre vie. Votre épouse hériterait du quart de vos biens. Si
vous craignez qu’elle ne perde son droit après votre mort, vous pouvez le lui
donner pendant votre vie. Si vous voulez faire une largesse au profit d’un
œuvre de bienfaisance pendant votre vie et à un moment où vous ne soufrez pas
d’une maladie grave, vous pouvez le faire à votre guise. Toutefois, il faut
éviter de léser vos héritiers ou les privertotalement de jouir d’une part de vosbiens.

Allah le sait mieux.

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